Tout le monde s'accordait à dire, avec plus ou moins de brio - j'ai beaucoup aimé Claude Allègre pour sa vivacité d'esprit, sa capacité à rentrer dans le mamouth, sa verve éclairante - que le rêve est source de créativité, donc une valeur importante pour l'innovation.
J'ai pensé au collège où sont 2 de mes enfants : quel est le rêve ou la composante créative qu'on leur met au menu ? Emportés dans la vague du zapping, de la consommation à gogo, de la technologie jetable et du prêt-à-penser bien marketé, ils se retrouvent face à une majorité de profs qui depuis longtemps ont enfoui leur enthousiasme et leur propre créativité derrière des certitudes non-négociables. Tous les profs ne sont pas comme cela fort heureusement. Claude Allègre a fustigé le corporatisme et l'immobilisme d'une profession qui, non contente de maitriser le développement intellectuel de nos ados, noyaute, par progéniture interposée les grandes écoles... Il y a apparemment moins de diversité dans les populations de nos écoles supérieures qu'il y a 20 ans, et les enfants de profs occupent la place. Pendant l'atelier, mon rêve à moi était que l'on propose une loi, totalement scandaleuse pour ceux que le monde marchand rebute : chaque prof devrait passer au moins un an en entreprise avant de démarrer sa carrière, avec un vrai job de vrai salarié... la loi exigeant, pourquoi pas, une piqûre de rappel d'un an tous les 10 ans par exemple ! Mais tout cela ne me regarde pas et restera dans le domaine de l'irréalisable...
Un peu plus tard, l'éternelle ritournelle "c'est la faute des gouvernants, c'est la faute des politique, c'est la faute des..." a refait surface dans les débats. J'ai pris le micro - je ne peux pas me retenir :-)
"Si le rêve est source de créativité, il ne prend toute sa valeur que lorsque l'on risque. Sans la prise de risque, on se déssèche. Avec le risque, on enrichit sa vie. Nous sommes tous des éducateurs. Quelle prise de risque autorisons-nous à nos enfants ? Quand j'avais 10 ans, je partais avec 3 cousins faire une semaine de vélo au fond de la Bretagne avec un budget de 8FF par jour, et les parents n'avaient pas le téléphone. Ose-t-on encore laisser nos enfants tenter l'aventure ? Avant de vous coucher ce soir, prenez un papier et écrivez les 10 événements de votre vie qui vous ont le plus marqués : analysez les rêves auxquels ils faisaient référence, et rappelez vous les risques que vous avez pris pour les réaliser..."
Bien sur, il ne s'agit pas de se mettre benoitement en danger pour claironner "je prends des risques, je prends des risques". Mais n'est-ce pas en sortant de sa "zône de confort" ou "zône de confiance" que l'on écrit les plus belles pages de sa courte vie...